Edito n°- 26

 


Thierry Mollard osfs

 

 

 

" il faut plus aimer l'obéissance que craindre la désobéissance."

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

L'évangile appelle chacun et toute la communauté à participer à la vie commune y compris dans l'élaboration des lois qui la régissent et dans les orientations nécessaires!


 

 

 

mardi 08 mars 2016


D'un ordre à l'autre !

La "vie religieuse" a trop pris de risques de se complaire à proximité de l'"ordre", au point que l'on finit par dire que l'ordre religieux est une association de personnes destinées à la vie religieuse. Mais l'ordre c'est aussi un acte par lequel une autorité manifeste sa volonté !

Imprimer encore l'Evangile !

Si tu veux imprimer encore l'évangile sur terre, ne te comporte pas en répétiteur de leçons, ni en donneur d'ordres, en développant, selon ton point de vue et par le menu, ce que chacun doit faire. Si tu veux que l'évangile soit encore imprimé sur les chemins du monde, fais naître dans le cœur des hommes et des femmes, avec qui tu es embarqué, le désir de la terre !

Napoléon, disait : “Intimer un ordre c'est intimider un regard.”

Quand dans le feu de l'action sans crier gare, le supérieur, ou le chef, qui est tenu à obligation de résultats, s'adresse à un subordonné, lui intimant l'ordre de changer de mission, cet ordre désincarné, dénué de tout fondement et de tout sens, fait baisser les yeux.
Ce signe ne révèle pas l'acquiescement, mais le plus souvent, scelle une soumission, posant ici, une véritablement bombe à retardement !
Un ordre abrupt, sans préparation et sans dialogue d'homme à homme, emprunte ces voies malsaines et humiliantes de la hiérarchie infantilisante!

Alors l'homme, naturellement, peut être révulsé. Pire, les témoins en seront scandalisés ! Comme il en coûte de voir un supérieur réduit à un relais hiérarchique, un chef d'entreprise !

Si tous s’accordent à dire sur le papier que "nul n'est taillable et corvéable à merci" tout acte autoritaire ôte toute attractivité ans la vie religieuse : elle cesse d'être vecteur d'une invitation à suivre le Christ !

Tout appel se distingue d'un simple ordre hiérarchique, il s'initie et doit être compris dans la radicalité de l'attachement au Christ, quand celui-ci s'adresse à Pierre, le renégat, juste avant de lui confier une mission il le questionne : " Pierre m'aimes-tu ? "
Sinon il est mensonger de dire : "Tout par Amour rien par force !"

Nous voilà interpellés sur l'autorité et la vie religieuse.

Le supérieur majeur, le supérieur provincial, ou le supérieur général, on finit par les appeler "supérieur" tout court; d'ailleurs, supérieur à qui, à quoi ?
Pire l'un devient "général" l'autre "provincial" Deux mots qui renvoient à la conquête militaire, et à la soumission, le général d'armée, ou le provincial; celui qui est du pays vaincu (pro vincere) !

Le supérieur finit par avoir un pouvoir similaire à l'évêque sur chaque prêtre, ou au prêtre sur chaque fidèle, il nomme les supérieurs locaux comme l'évêque nomme ses curés ! Bref nous voilà tout droit inscrit dans un contexte de hiérarchie, d'administration !

Au moins, lorsque l'on parle du Père Abbé, on attribue à ce supérieur la qualité... redondante de père... Père et abbé qui veut dire père aussi ! Je ne dis pas pépère!

L'autorité du supérieur consiste à être au service de l'accomplissement de la mission commune des frères ! (selon la racine latine 'auctoritas' qui vient de 'augeo' : " accroître, augmenter!")

Cela oblige à un second constat. La communauté religieuse qui est une cellule de l'Eglise vit sous l'autorité de la Parole et des sacrements. Elle n'est pourtant pas une société essentiellement hiérarchique, où tout serait organisé sur le binôme pasteur-troupeau.

La communauté religieuse est une famille, elle est une fraternité d'un petit groupe de baptisés réunis pour tirer chemin ensemble dans une même direction.
Le supérieur relie les différents membres, son moyen privilégié c'est l'obéissance, à la forme active et passive : obéir, (du latin "oboedire")  "prêter l'oreille
" ! Chacun est invité à en faire autant avec tous ses frères, pour que la direction choisie soit commune !

Par ailleurs dans le monde moderne occidental l'autorité, quand elle n'est pas magnifiée pour devenir refuge, embrigadement... prend plus volontiers le visage de la "démocratie directe" ou de la coresponsabilité qui est un héritage de Vatican II.

Cette perception convoque l'implication personnelle de chacun; nul ne peut dire le supérieur, "n'a-qu'à-faire!" L'évangile appelle chacun et toute la communauté à participer à la vie commune y compris dans l'élaboration des lois qui la régissent et dans les orientations nécessaires ! Celles ci ne devraient jamais être enfermées et limitées aux sommes des articles des Constitutions, aux multiples détails... mais d'avantage animées par un directoire qui donne une direction commune, et des "coutumiers" révisables dans la permanence de la relecture sur laquelle veille le supérieur!
Comme le pape François aime à dire "Je ne peux tout faire tout seul" le supérieur ne peut que redire que l'autorité ne s'exerce qu'au creuset du dialogue vrai entre les frères.

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